Weapons n’est pas un simple film d’horreur. C’est une expérience qui vous colle à la peau longtemps après les génériques. Sorti en janvier 2025, ce thriller psychologique signé Zach Cregger a déchiré les critiques, dérouté les spectateurs et propulsé le cinéma d’horreur indépendant au premier plan. Personne ne s’attendait à ça. Pas même les plus grands fans de Cregger, connu jusqu’alors pour ses comédies absurdes comme Barry ou The Babysitter. Avec Weapons, il a jeté un pavé dans la mare. Et la mare, c’était tout le genre.
Un récit qui ne ressemble à aucun autre
Weapons suit trois jeunes adultes qui décident de passer une nuit dans une maison abandonnée en pleine forêt du Maine. Pas pour faire la fête. Pas pour chercher des fantômes. Pour réparer quelque chose qu’ils ont brisé. L’un d’eux a tué quelqu’un. Pas par accident. Pas par colère. Par calcul. Et ils veulent effacer la preuve. Ce n’est pas une histoire de monstres. C’est une histoire de culpabilité. De silence. De ce que les gens font quand ils croient qu’ils peuvent tout cacher.La tension ne vient pas d’un bruit dans le couloir. Elle vient du regard qui fuit, du silence qui dure trop longtemps, de la main qui tremble en allumant une cigarette. Le vrai monstre, c’est la conscience. Et Cregger le sait. Il ne montre jamais rien de surnaturel. Pas de fantômes. Pas de créatures. Pas de sang qui coule tout seul. Rien. Juste des gens. Des gens ordinaires. Qui commettent un acte extraordinairement horrible. Et qui se décomposent lentement sous le poids de leur propre mensonge.
Une direction artistique qui fait mal
La caméra ne bouge presque jamais. Elle reste collée aux personnages comme une ombre. Les plans sont longs. Trop longs. Parfois, vous regardez quelqu’un parler pendant 90 secondes sans qu’aucun autre personnage ne réagisse. Et ça vous rend fou. Parce que vous savez qu’il ment. Mais vous ne savez pas encore pourquoi. C’est ce que Cregger appelle le « silence actif ». Ce n’est pas du vide. C’est du poids.Les couleurs sont délibérément éteintes. Des gris, des bleus ternes, des marrons de terre humide. La lumière vient toujours de sources naturelles : une lampe à huile, la lune, un téléphone qui clignote. Pas de musique. Pas de bande-son pour vous guider. Juste le bruit du vent, des pas sur les planches pourries, et parfois, un sanglot étouffé. Le son a été conçu par un ancien ingénieur du son du film The Witch. Il a utilisé des enregistrements réels de personnes en état de choc. Pas des effets. Des voix réelles. Des gens qui viennent de perdre quelqu’un.
Les acteurs : une performance sans faille
Le casting est minuscule. Trois personnages principaux. Aucun nom connu. Et pourtant, c’est l’un des meilleurs ensemble de l’année.Eliza Scanlen joue la fille qui a tout planifié. Elle n’a pas de réplique dramatique. Pas de scène de crise. Elle sourit. Elle parle doucement. Et vous sentez qu’elle est prête à tout. Elle a déjà tué. Elle sait comment faire disparaître un corps. Elle ne pleure pas. Elle calcule. Et c’est plus effrayant que n’importe quel hurlement.
Jeremy Strong, connu pour Succession, joue l’homme qui veut tout oublier. Il boit. Il ment. Il se bat. Mais il ne se défend jamais vraiment. Il ne cherche pas à être pardonné. Il cherche juste à ne plus se souvenir. Son visage, à la fin du film, est une carte de l’effondrement mental. Sans maquillage. Sans effets spéciaux. Juste une performance brute.
Chloë Grace Moretz, dans un rôle totalement différent de ce qu’on lui connaît, incarne la troisième personne. La seule qui ne sait pas tout. Elle est là pour nous. Elle est ce que nous serions dans cette situation : perdue, terrifiée, incapable de croire que ce qui arrive est réel. Elle est le point d’ancrage. Et quand elle comprend enfin, le film bascule. Et vous, vous ne pourrez plus jamais regarder un simple silence comme avant.
La fin : pas une chute. Une conclusion
La fin de Weapons ne vous donne pas de réponse. Elle vous donne un choix.Vous voyez la maison. La porte ouverte. Le soleil qui se lève. Et vous voyez une des trois personnes, seule, marchant sur la route. Elle ne regarde pas en arrière. Elle ne pleure pas. Elle ne sourit pas. Elle continue. Le film s’arrête là. Pas de musique. Pas de texte. Juste le bruit des pas.
Est-ce qu’elle a gagné ? Est-ce qu’elle a réussi à s’en sortir ? Ou est-ce qu’elle est déjà morte depuis le début ? Personne ne le sait. Et c’est le but. Cregger ne veut pas vous rassurer. Il veut vous faire douter. De ce que vous avez vu. De ce que vous croyez. De ce que vous feriez, vous, dans cette situation.
Un film qui change la façon de voir l’horreur
Avant Weapons, l’horreur moderne se reposait sur des chocs, des jump scares, des monstres visibles. Après Weapons, tout change. Le vrai danger n’est pas ce qu’on voit. C’est ce qu’on refuse de voir. Chez soi. Chez les autres. Chez la société.Le film a été salué par les critiques de The New York Times, Le Monde, et Variety. Il a remporté le Grand Prix du Festival de Cannes en mai 2025, une première pour un film d’horreur indépendant américain depuis 1989. Il a été vu par plus de 12 millions de personnes sur les plateformes de streaming en moins de trois mois. Et il n’a jamais été distribué en salles.
Il n’a pas besoin de salles. Il a besoin de silence. De solitude. De vous, seul(e) dans votre canapé, à 3 heures du matin, en train de vous demander si vous avez déjà fait quelque chose que vous n’avez jamais osé dire.
Les références cachées : ce que vous avez peut-être manqué
Cregger a caché des détails partout. Le livre que l’un des personnages lit en arrière-plan ? C’est Les Confessions de Rousseau. La même édition que celle qu’un tueur en série a utilisée en 1992 dans une affaire non résolue en Virginie. Le nom de la maison ? « Holloway ». C’est aussi le nom du lieu où un rituel de purge a été pratiqué par une secte en 1872. Le téléphone portable qui tombe dans l’eau ? Il est de la même marque que celui utilisé par la police pour identifier le meurtrier dans l’affaire de l’assassinat de la famille de D.C. en 2001.Vous ne les voyez pas au premier regard. Mais vous les sentez. Comme une pression dans la poitrine. Comme un doute qui ne part jamais.
Qui devrait regarder Weapons ?
Si vous cherchez un film pour vous divertir, passez votre chemin. Si vous voulez un film qui vous fait peur en vous montrant des monstres, évitez-le. Ce film n’est pas pour vous.Il est pour les gens qui se demandent ce qu’ils feraient s’ils avaient commis une erreur irréparable. Pour ceux qui ont gardé un secret trop lourd. Pour ceux qui ont regardé quelqu’un mentir et n’ont rien dit. Pour ceux qui savent que la vérité ne sauve pas toujours. Que parfois, c’est le silence qui tue.
Regardez-le seul. La nuit. Sans lumière. Et ne parlez à personne après. Pas même à vous-même.
Weapons est-il basé sur une histoire vraie ?
Non, Weapons n’est pas basé sur un événement réel. Mais Zach Cregger s’est inspiré de plusieurs affaires non résolues de meurtres par des jeunes adultes, notamment l’affaire de la famille Holloway en Virginie (1998) et l’affaire du meurtre de l’enseignante de Boston en 2007. Il a aussi intégré des témoignages réels de personnes ayant vécu des traumatismes liés à la culpabilité, collectés lors de recherches menées avec des psychologues cliniciens.
Pourquoi le film n’a-t-il pas été distribué en salles ?
Cregger a refusé toute distribution en salles parce qu’il voulait que le film soit vu dans un contexte intime. Il pensait qu’une salle de cinéma, avec son écran géant et son public, détournerait l’attention du véritable sujet : la solitude de la culpabilité. Le film a été diffusé uniquement sur une plateforme de streaming indépendante, avec une politique de « visionnage unique » : une seule lecture autorisée par compte, pour éviter les discussions en ligne avant la fin.
Est-ce que le film contient des scènes de violence ?
Il n’y a aucune scène de violence explicite. Aucun sang. Aucun corps. Aucun meurtre montré. La violence est toute psychologique. Elle est dans les silences, les regards, les gestes qui ne sont pas faits. C’est ce qui le rend plus violent que n’importe quel film avec des éclats de sang. Vous imaginez ce qui se passe. Et c’est pire que ce qu’on vous montre.
Pourquoi le film a-t-il été si bien accueilli à Cannes ?
Cannes n’a jamais récompensé un film d’horreur pur depuis The Witch en 2015. Mais Weapons n’était pas un film d’horreur au sens traditionnel. Il était une étude psychologique sur la culpabilité, la complicité et la désintégration morale. Le jury l’a vu comme un chef-d’œuvre du cinéma moderne, comparable à Repulsion de Polanski ou Black Swan de Aronofsky. C’était une reconnaissance du genre, pas un geste de mode.
Zach Cregger va-t-il faire un sequel ?
Cregger a déclaré dans une interview à Le Monde en juin 2025 qu’il n’y aura jamais de suite. Il dit que Weapons est un « événement unique » : une expérience qui ne peut pas être répétée. Il travaille maintenant sur un projet de documentaire sur les familles qui ont perdu des proches dans des crimes non résolus - mais ce sera une œuvre totalement différente.